Dernier numéro de Survey Magazine

Les études « In Real Life » de l’IFOP

Les études « In Real Life » de l’IFOP

Survey-Magazine : L’IFOP semble porter un intérêt particulier aux études immersives. Vous les appelez les Études « IRL » ou « IN REAL LIFE ». Pouvez-vous nous en dire plus ?

Stéphane Truchi : Il s’agit d’une tendance clé dans les études, à l’heure où les annonceurs ont besoin plus que jamais d’être en prise directe avec leurs consommateurs. Nous avons choisi de les dénommer les études « IN REAL LIFE », en résonnance avec le sigle IRL utilisé sur les réseaux sociaux par opposition à la vie « virtuelle » sur Internet. Ces solutions, qui consistent à nous immerger dans l’environnement, le lieu de vie, l’intimité, le parcours d’achat du consommateur, sont en plein bouleversement et vont au-delà de ce que nous pouvions observer avec les démarches ethnographiques ou d’accompagnement de l’individu lors d’un parcours d’achat. Les Etudes « IN REAL LIFE » n’ont pas pour objet de les remplacer mais d’apporter des éclairages complémentaires grâce à une posture interviewé/interviewer très différente. Dans les études « IN REAL LIFE », la relation qui s’installe n’est pas seulement verticale et interrogative mais également participative, ouverte, fonctionnant souvent sur le mode de la conversation. L’interviewé devient « reporter » de sa propre vie, ou « partenaire » lorsqu’il se rend dans les points de vente pour évaluer une campagne/une offre, ou « acteur » en se mettant en scène lors d’un témoignage sur des motivations intimes, ou « co-créateur» lorsqu’il est engagé avec d’autres pairs. Le mode de langage est de nature différente, puisqu’il reprend tous les outils à la disposition de l’individu, la photo, la vidéo, … permettant ainsi d’exprimer autrement et de dire autre chose que ce que les mots n’exprimeraient pas, ou que l’interviewé ne révélerait pas car il n’en aurait pas conscience. D’ailleurs les jeunes générations se font de plus en plus économes des mots et la photo est devenue un langage privilégié. Et dernier point, et pas des moindres, ces études « IN REAL LIFE » permettent d’identifier des aspérités, des extrêmes, des contradictions, en tout cas de les mettre plus rapidement à jour… la photo, la vidéo révélant, le plus souvent, des facettes non exprimées.

Pouvez nous donner des exemples d’études réalisées dans ce cadre ?

A l’IFOP, nous avons développé une gamme complète de solutions d’études « IN REAL LIFE », qui ont toutes comme mission d’immerger nos clients dans la vie réelle du consommateur.
Tout d’abord, l’approche « Picture Prospective », lancée en octobre 2014, avec notre partenaire Clic&Walk. Cette démarche permet de nous faire entrer dans l’environ-nement, l’univers, le lieu de vie d’un échantillon représentatif d’une génération/d’une catégorie d’individus à partir d’une masse de photos personnelles faites et commentées par les foyers missionnés, au sein de la communauté des clicwalkers. Bref, cette méthode permet de pousser la porte de 1000 foyers et ainsi, de prendre conscience d’une réalité que les mots seuls auraient du mal à décrire. Elle permet d’identifier des insights non révélés par le dire. Ainsi par exemple, la dernière « Picture Prospective » [Intérieurs / 25-35 ans], qui consistait à décrypter 10 000 photos d’intérieurs (Séjour et Cuisine) réalisées par 1000 jeunes foyers de 25-35 ans, a révélé tout d’abord, la spontanéité de la matière adressée, sans fard, reflet exact de leurs intérieurs, loin des images projetées par les médias et la publicité. Elle nous a permis notamment de dégager des différentes marquantes en termes d’investissement entre les pièces. Ces résultats que nous avons challengés auprès d’un collège d’experts du monde de la maison (analystes et praticiens) nous ont permis d’élaborer plus d’une dizaine de pistes et d’idées pour les acteurs du monde de la maison. Avec cette approche, la photo est traitée comme une donnée sociologique qui révèle des facettes non montrées, méconnues de l’environnement de l’individu et qui sont souvent à la source de pépites pour l’innovation.

« Digital Diary », lancé en 2014 permet pour sa part d’exploiter avec spontanéité les gestes du quotidien et les routines d’usage de produits ou de services que nous font partager les consommateurs. « Digital Diary » ouvre notre méthodologie de questionnement au contexte dans lequel le consommateur répond : outre des réponses aux questions que nous lui posons, le répondant peut désormais partager photos, vidéos, géolocalisation… en s’appuyant sur les devices qui l’entourent. Ambitionnant de mieux capter les parcours du quotidien, en point de vente, dans les transports, au travail, etc. l’IFOP offre ainsi à ses clients une vision ouverte sur l’intime, enrichie, et qui profite et s’adapte à la mobilité des interviewés.

« Grand Angle », lancé tout début 2015, quant à lui, permet de suivre pas à pas une expérience utilisateur à l’égard d’un service consommé dans un environnement précis grâce à l’usage d’une Go Pro portée par l’interviewer qui recueille en direct non seulement des images de ce qui est en train de se dérouler mais aussi les commentaires de l’interviewé sur des problèmes rencontrés, des optimisations à envisager à l’égard d’un service, d’une information… Et autre avantage, les séquences vidéo étant indexées en termes de contenus, le montage est réalisé en temps accéléré et permet de produire un rapport d’étude – sous forme d’un film, facilement partageable en interne.

En 2014 aussi, nous ne pouvions pas être absents de l’univers du shopper et de la mesure de la réalité perçue par l’acheteur au point de vente, réagissant in situ. Nous avons donc lancé « InStore Vision ». S’appuyant sur la communauté Tcheck’it, cette approche permet de réaliser en situation de mobilité des missions différentes selon l’enjeu de la marque : mesure de satisfaction à l’égard des points de contacts, mesure de la qualité de la relation en point de vente, suivi du parcours client au sein d’une catégorie… .

Et puis pour finir, l’IFOP se distingue avec la qualité de ses communautés en ligne, « InLife Communities » (2014), dont la grande particularité est de permettre une interaction virtuelle et continue entre le client, l’institut et une communauté de consommateurs, grâce à la combinatoire de formats d’interrogation pluriels : journal intime, espace de discussion collective, live chat, appli mobile, plateforme de blogs individuels, carnet de vie photo, etc. Cette approche associant temps court et temps long, permet de suivre l’évolution des attitudes, la réalité et la diversité des usages et d’engager les interviewés dans une relation de co-création avec une communauté de consommateurs, d’experts (parfois) et le client.

Pensez-vous qu’il y a un lien entre études immersives et BIG DATA ?

A l’ère de l’« Internet of Things », la distance entre la marque et l’intimité du consommateur s’amenuise. Les objets connectés sont les relais de l’immersion de ces marques dans notre quotidien, et leur développement s’accompagne de la captation de quantité de données nouvelles, qu’il nous faut aujourd’hui appréhender, conjuguer à nos données d’études, et restituer intelligemment pour offrir une vision 360° à nos clients. C’est pourquoi, ces études « IN REAL LIFE » permettent de donner du sens à ces nouvelles données, en les rendant concrètes, illustrées, intégrées dans la vie des individus et donc inspirantes pour les acteurs du marketing.