airbnb, Undiz, Amazon ou Deezer : Comment les entreprises analysent vos données personnelles sur Twitter, Apple watch ou dans la rue ?

La digitalisation du marketing génère un afflux de données considérables. 90% des données actuelles disponibles ont été créées durant ces deux dernières années à partir de ce que l’on appelle les nouvelles ressources (réseaux sociaux, smartphones, objets connectés …). Le flux des données personnelles (ou PII) est considérable : les nouveaux formats de données dits « non structurées » en sont la preuve et constituent un big data – issus des photos prises dans la rue, des commentaires sur Facebook ou alors des avis des internautes sur des sujets précis. Les exemples sont nombreux aux USA : grâce aux miroirs connectés des armoires intelligentes, les américaines choisissent le matin leur garde-robe sur un écran avant même d’avoir passé le moindre vêtement. Tout leur rituel d’habillage est suivi et traité (le temps passé devant le miroir, devant telle ou telle couleur, ou le type d’habit sur lequel la dame s’est le plus attardé). Ces miroirs intelligents vous proposent alors des publicités ciblées pour les sous-vêtements Undiz, les robes Hayari ou les costumes Thierry Mugler.

Le cabinet Gartner prévoit une croissance de 800% des données à traiter d’ici cinq ans. Face à ce Big Data, il est nécessaire pour les directions marketing de mettre en place une organisation « Data-driven » pour traiter l’ensemble de ces données, et les utiliser efficacement. Mais un autre challenge s’offre aux yeux des entreprises : où trouver de l’information pertinente ? Les entreprises ont aujourd’hui la possibilité de tracker les données personnelles d’une clientèle dans la rue ou dans un supermarché à l’aide de la géolocalisation et du parcours client. Or toutes les entreprises n’ont pas accès à ces techniques sophistiquées. Le challenge des nouveaux concepts marketing, comme le Street Marketing™, l’ambient marketing ou l’outdoor marketing est de créer la surprise en étant très créatif, sans pour autant posséder une technologie chère et complexe d’utilisation. En bref, plus le consommateur est surpris par des opérations impactantes dans la rue, plus la récolte de son email et d’informations personnelles se fera de son propre gré – permettant ensuite une interprétation simplifiée de ce big data.

Cet article se propose de définir comment les entreprises analysent les données issues des nouvelles ressources au travers de deux parties. La première sera consacrée aux nouvelles données et à leurs méthodes d’analyse. La deuxième partie dévoilera comment les nouveaux concepts marketing permettent d’exploiter des données dans des endroits inattendus.

Les nouvelles données non-structurées sont variées. Elles passent par différents supports comme les photos, les objets connectés, les e-mails etc. et toutes les données issues des réseaux sociaux. Les objets connectés ont été par exemple inventés pour mieux comprendre les hommes et les femmes et une fois utilisés, il n’y a plus de limites sur la connaissance du segment des consommateurs, tant le tracking des données sur les individus est riche et disponible.

Le parcours du consommateur dans sa vie de tous les jours constitue un ensemble d’éléments importants à traiter pour l’entreprise. Cette base, agrémentée des autres données (commentaires et photos sur les réseaux sociaux) représente 80% des données dont dispose une entreprise aujourd’hui pour pouvoir étudier sa cible. Ce Big Data analytique est exploité par de nombreuses entreprises. En France, près de la moitié des structures professionnelles exploitent les nouvelles sources de données. Et 48% des répondants exploitent au moins trois nouvelles sources de données non relationnelles comme les objets connectés. Une femme d’affaires peut désormais allumer la télévision qui est connectée au miroir de sa salle de bain. Elle peut regarder les informations tout en se préparant. En ouvrant une application Guerlain de maquillage, elle va pouvoir visionner par réalité augmentée, quel maquillage lui va le mieux aujourd’hui, sans même avoir passé un pinceau sur son visage. Suivant les teintes de maquillage quantifiées de manière exacte en fonction des mois de l’année, la femme recevra une publicité saisonnière pour la dernière ligne de maquillage Terracotta.

Les nouvelles données collectées via les objets s’ajoutent aux données classiques que les entreprises avaient l’habitude d’utiliser jusqu’à maintenant pour segmenter leurs cibles (adresse mail, numéro de sécurité sociale etc.). Il existe trois grandes étapes pour classer les données et par la suite cibler le prospect. La première étape est la collecte des données personnelles plus communément appelé CRM. La seconde est celle des données anonymes qui ne permettent pas d’identifier directement une personne. La plus célèbre est le cookie (client non loggé ou prospect) sur un site. L’annonceur peut cibler ses contacts CRM en personnalisant son site en fonction du visiteur. Enfin la troisième étape est celle de la collecte des données intelligentes. L’entreprise a recours au datamining. La donnée va alors être « devinée » par l’annonceur, c’est le cas de Netflix, Amazon, ou encore DRESR. Cette dernière est une start-up américaine qui peut deviner, en fonction de vos achats passés, des tendances du marché et de vos caractéristiques physiques, quel vêtement vous ira le mieux lors d’un achat online.

Malgré tout cela, il est très difficile de collecter des données. Tous les consommateurs ne sont pas équipés d’objets connectés pour le moment. Toutes les entreprises ne savent tout simplement pas collecter et étudier ce Big Data. Les directions marketing manquent de compétences pour analyser les données (IT, User Experience). L’urgence est de trouver des personnes ayant les qualifications nécessaires comme un Chief Digital Officer ou un Datascientist. De nouveaux outils doivent également intégrer la stratégie de l’entreprise comme le DMP (Data Management Plateform) ou la Suite Marketing 360, ce qui entraine des coûts substantiels. Ces deux outils permettent de traiter des cookies et stocker le comportement de l’internaute pour affiner la cible. Devant cette difficulté, les entreprises doivent rivaliser d’ingéniosité afin de trouver et tracker des données personnelles. La deuxième partie de cet article vise à expliquer au travers de quels mécanismes innovants, l’exploitation des données est rendue possible aujourd’hui.

SURPRENDRE LE CONSOMMATEUR POUR RÉCUPÉRER DES DONNÉES

De nos jours, les entreprises ont deux centièmes de seconde pour capter l’attention d’un passant en magasin ou dans la rue. Ce dernier est également confronté à 200 messages publicitaires par jour. Afin de réduire ce flux d’information trop envahissant et l’optimiser, les marketeurs tentent de cibler davantage en observant et en analysant le comportement des consommateurs. Pour cela, il est nécessaire de récolter de multiples données qui ne sont pas toujours accessibles. Ce Big Data représente un atout stratégique pour les acteurs économiques. La société Airbnb a par exemple offert il y a quelques mois une nuit à gagner à Courchevel dans une chambre aménagée dans un téléphérique. Un concours a été mis en place où il était demandé de répondre par mail à une annonce en 100 mots afin d’exprimer sa motivation pour vivre cette expérience. A cette occasion un téléphérique était customisé et visible depuis la station. Avec cette opération, Airbnb peut générer une récolte de données facilement tant les internautes et vacanciers ont été surpris par l’opération. La marque pionnière et leader peut ainsi obtenir toutes les informations des particuliers qui lui sont nécessaires, en les croisant avec leurs visites sur le site web de la marque mais également certaines photos postées et partagées sur les réseaux sociaux. Il est dans ce cas possible de différencier le parcours client du parcours prospect. Malgré l’exemple réussi de Airbnb, 2 problèmes se posent : où récupérer toutes ces données et comment les collecter ?

L’une des réponses au premier problème, et qui peut sembler hors de propos, tant on parle du Big Data et du smart data sur internet, est la rue. Après tout, quel est le point de liaison entre la maison, le travail et les activités de loisirs ? La rue n’est-elle pas un lieu de rencontre et d’échange propice à la récolte de ces informations ? Le deuxième problème est la collecte de ces data. Pourquoi les chalands laisseraient-ils leurs coordonnées ? Le Street Marketing™ est une forme de communication urbaine européenne basée sur la créativité et un coût d’opérationnalisation bas. Si un passant est surpris par une opération dans la rue, il laissera d’autant plus volontiers des informations sur lui. Trois types de marketing créatif sont alors possibles dans la rue et autour de la rue pour collecter une grande quantité d’information sur le chaland : en magasin via le marketing expérientiel, en extérieur (plage, station de ski, métro etc.) via l’outdoor ou l’ambient marketing, et la rue via le Street Marketing™.

Big Data & Marketing expérientiel

Comment collecter des informations complexes en magasin ? L’utilisation du marketing expérientiel, à savoir la vente de l’expérience de consommation plutôt que du produit lui-même, permet de surprendre le consommateur sur le point de vente et d’en apprendre sur le client. La marque de lingerie Undiz a mis en œuvre à cet effet, une technique expérientielle à l’aide d’une opération dite « phygitale » (croisement du digital et du monde physique). Créée par la société Improveeze, partenaire du laboratoire LCA Consulting, la problématique était la suivante : faire rentrer un magasin de sous-vêtements féminins de 150 mètres carrés dans seulement 45 mètres carrés. Pour ce faire, la marque a proposé à la clientèle de sélectionner directement l’ensemble des produits du magasin via un écran tactile. Il suffisait de s’enregistrer sur une borne pour recevoir via des tubes à air comprimé, le sous-vêtement de son choix. Résultat ? Une collecte gigantesque d’informations sur les clients au moment du paiement par carte bancaire, rendue possible par le coté original et attractif de l’opération. Par la suite, un suivi des photos postées, la trace de la géolocalisation avec des partenariats de sociétés spécialisées permettent de recréer le parcours client. Ces données dites « publiques » – récupérées par l’activité des internautes ou des utilisateurs de téléphone portable – est un exemple de Big Data à traiter et à analyser.

Big Data & Outdoor Marketing

L’outdoor marketing proche de l’ambient marketing est une forme complexe de communication d’entreprise, qui mobilise les éléments de l’environnement externe, incluant potentiellement tout type de surface physique existante, pour transmettre des messages à même de susciter l’engagement du consommateur. Michel & Augustin a décidé de réaliser une campagne de recrutement dans le métro parisien. Une procédure qui sort de l’ordinaire et qui n’a pas manqué de marquer les esprits des voyageurs et des internautes. Une façon pour la Directrice des Ressources Humaines de détecter les talents à même le monde extérieur en bousculant les habitudes des usagers : « Est-ce que quelqu’un connait quelqu’un qui a une belle-sœur qui elle-même a un beau-frère et un cousin qui cherchent un job ? ». Tous les Curriculum Vitae récoltés ce jour ainsi que les candidatures reçues par e-mails, les tags nominatifs sur Facebook et les hashtags sur Twitter sont sources de données et donc de Big Data à traiter pour mieux cerner les fans latents et autres non consommateurs de la marque. Cette action d’Ambient marketing fût une réussite marketing, bien que d’impulsion RH. Elle a rempli tous les critères d’une bonne opération : mesurable, malgré la complexité des données collectées, un moindre coût d’opérationnalisation et de développement, une image de marque développée grâce à un buzz créatif et un lien direct crée avec les consommateurs.

Big Data & Street Marketing™

Il existe sept types de parcours client permettant la collecte de données dans la rue. Du stand d’essai de chaussures à une dégustation de glaces, le Street Marketing™ a la possibilité de créer un espace éphémère pour le lancement d’un nouveau produit : on appelle cela l’event-product. Le consommateur est invité à tester un nouveau produit dans la rue, ce qui permet de prendre ses coordonnées et tracer les publications qu’il fait online. Mais les distributions de flyers originales qui peuvent amener à jouer à un jeu en ligne sont également un moyen de récolter des informations assez complexes. L’action événementielle dans la rue consiste quant à elle à animer une opération en rapport avec la marque. C’est par exemple Red Bull qui va suivre pendant plusieurs mois les réactions de sa communauté lors de ces fameux challenges : comme par exemple lancer un homme de l’espace en chute libre ou slalomer avec un avion au milieu des buildings d’une ville. L’animation humaine consiste à payer des employés de la marque pour montrer le produit au travers d’une communication décalée. Dernièrement, la marque Twingo a effectué une opération marketing dans toutes les grandes villes de France. Pour attirer les prospects et les inciter à tester la nouvelle voiture, de nombreux cadeaux originaux étaient à gagner. Comment ? Par un simple selfie posté sur les réseaux sociaux avec un hashtag #LaVéritéSurLesFilles. Le nombre de photos postées sur Instagram, Facebook et Twitter correspond au nombre de goodies distribués (t-shirt, sweat, tote-bag). Si les opérations de Street Marketing™ sont créatives elles doivent être réfléchies néanmoins très en amont pour collecter des données : l’opération Twingo est très complexe d’interprétation de données. Tout comme les covered-actions qui prennent la forme de déguisement de mobilier urbain -une idée largement inspirée du street art. Pour la promotion de sa marque au Danemark, Deezer a par exemple pensé à conceptualiser des casques géants diffusant de la musique dans des abribus. Ce genre d’opération décalé crée le buzz mais n’est pas conçu pour interpréter le Big Data puisque le géant français du streaming le fait très bien online. Les actions mobiles comme le vélotaxi, le segway, le showcom (écran porté par un animateur dans la rue et proposant un contenu numérique) sont les nouvelles techniques de visibilité mobile. Par exemple, la tournée du bus Coca-Cola pour l’opération « Share a Coke » dans toutes les grandes villes de France. Le bus proposait un vrai parcours de fan avec la création de sa canette personnalisée à l’avant du bus, suivie d’une zone selfie pour partager instantanément la photo sur les réseaux sociaux puis enfin un jeu concours offrant aux passants la possibilité de recevoir gratuitement chez eux une bouteille en verre avec leur nom sur l’étiquette. Un nombre incalculable de données à interpréter avant de définir un segment de client type. Enfin les animations digitales prennent la forme d’animation électronique dans la rue et améliorent la notoriété et la visibilité de la marque dans l’espace public. La digitalisation de l’opération à un moment donné (inscription sur un site internet dans la rue, utilisation d’un QR code etc.) rend la collecte de données plus simple à analyser par la suite.

Mais attention, quelques sociétés ont tenté d’appliquer une opération de Street Marketing™ pour récolter des données et ont essuyé de sévères revers. Au début de l’année, une publicité de prévention autoroutière a été mise en scène : un animateur portant un cercueil circulait dans les rues de Montréal sur lequel était mentionné « contre une auto, un piéton n’a aucune chance ». Cette opération avait pour but de créer le buzz, et l’analyse des données aurait permis d’étudier des donateurs possibles. L’opération n’a fait que 12 vues sur YouTube quelques semaines après sa mise en ligne. L’action n’a pas été conçue en amont pour être digitalisée de manière correcte rendant impossible le tracking exact des données ainsi que son exploitation.

La collecte des données issues de nouvelles ressources explose. La rue, l’expérience en magasin ou l’outdoor marketing sont des terrains intéressants pour impacter un chaland et collecter de la « data ». Ces mêmes datas récupérées via la surprise du consommateur, dans un univers et à un moment inattendu, permettent par la suite de reconstituer une sorte de parcours client, online et offline, plus facile d’interprétation que l’exploitation du Big Data traditionnel. Attention néanmoins à bien réfléchir aux outils, à la campagne et à la mécanique de collecte et d’interprétation des données en amont. Autrement, c’est du buzz pour faire du buzz et votre argent sera bien mal dépensé.

Le but de chaque entreprise est de transformer un prospect en client. Les nouvelles données vont permettre à une marque d’automatiser des scénarios et ajuster si nécessaire la stratégie de l’entreprise. Comme nous avons pu le voir précédemment, Airbnb a su cibler sa clientèle grâce à des opérations de Street Marketing ™. Cette cible est alors retargétée sur des comportements spécifiques. L’entreprise pourra par la suite personnaliser sa stratégie en fonction de sa segmentation. L’enjeu est donc celui de la personnalisation des offres. Le but est de mettre en avant des produits adaptés aux envies de chacun. Le marketing va devenir une science exacte si une organisation Data-driven est bien mis en place. Pour une efficacité optimale dans l’exploitation de ces données, la compagnie devra avoir recours à un Datascientist et Chief Data Officer. Ils deviennent des ressources sûres et ont un rôle crucial dans la stratégie marketing. Ce système de prise d’information rapporte une économie conséquente pour l’entreprise : les données sont facilement collectées depuis le Big Data et exploitées à moindre coût.